Article publié dans BRA Tendances Restauration : Comment améliorer la productivité en restauration ?
Si dynamique soit-il, le secteur de la restauration commerciale a encore beaucoup à faire pour optimiser durablement la productivité.
Comment peut-on s’y prendre pour améliorer durablement la productivité en restauration ?
Laurent Pailhès nous en parle et nous livre ses conseils.
Comment peut-on initier la recherche d’une productivité durable en restauration ?
Tout d’abord en distinguant les actions à court terme, celles inférieures à 6 mois, des actions à moyen terme, dont l’effet est attendu entre six mois et deux ans.
Les décisions managériales admises et répandues vantent les mérites d’actions à court terme. A mon sens, essentiellement parce que les résultats sont immédiatement mesurables et parce que cela évite de se poser des questions qui n’appellent pas forcément de réponses. A court terme, le management peut augmenter la productivité en planifiant à flux tendu, voire en sous-effectif. J’ai bien constaté des avantages à gérer de la sorte. L’avantage majeur est que les personnes qui travaillent sont toujours occupées. Lorsque les employés attendent le client ou cherchent du sens à leur travail, la productivité s’effondre. Des problèmes mineurs prennent une expression démesurée. En planifiant à flux tendu, l’entreprise devient plus efficace. Double effet à court terme : le management gère moins de problèmes de ressources humaines et améliore ses indicateurs de gestion.
Cependant, cette façon de planifier entraîne aussi de sérieux inconvénients qui se traduisent en surcoût pour l’entreprise. Et comme ce surcoût n’est pas mesuré, il passe presque inaperçu dans les ratios de rentabilité. Par exemple, le taux d’absentéisme a tendance à augmenter en raison d’une charge d’activité supérieure à celle acceptable durablement. On pourra opposer à cet argument que l’entreprise est partiellement remboursée du coût de l’absentéisme par les indemnités journalières versées par la sécurité sociale, il n’en demeure pas moins que a) il reste un reliquat de charges dans les comptes b) la révision des plannings due aux arrêts maladie mobilise du temps de management qui pourrait être utilisé autrement.
Autre conséquence : le niveau de turnover augmente. Le turnover est supérieur dans les entreprises où la charge d’activité est chroniquement supérieure à la normale. Ceci étant dit, il est tentant de ne pas trop agir sur le turnover parce que les périodes de vacances de planning, en raison des chassé croisé entre les salariés qui partent et les nouveaux entrants, font réaliser une économie de charges de personnel.
Et les coûts cachés sont immenses. Ils sont la conséquence du temps passé à conduite les entretiens de sortie et d’entrée, du coût de réalisation des STC’s, du coût de passages des annonces de recrutement, des coûts d’intégration et de formation. Des points de marge nette partis en fumée. Comme ces coûts cachés ne se voient pas de prime abord, le management a l’impression qu’ils n’existent pas.
Parlons maintenant du manque à gagner. On est d’accord qu’il est plus compliqué de bien accueillir les clients lorsqu’on manque de personnel. Les suggestions de ventes additionnelles (apéritifs, desserts….) ne se font plus. Les clients deviennent irritables parce que non pris en charge convenablement.
Organiser une unité de restauration sur le principe du flux tendu consiste finalement à se priver d’un chiffre d’affaires récurrent et d’un chiffre d’affaires complémentaire. Mais comme pour les coûts cachés, on peut avoir l’impression que ce manque à gagner n’existe pas.
Pourquoi le restaurateur peut-il négliger le manque à gagner dans son établissement ?
L’erreur qui résume la situation est la suivante : en planifiant à court terme, l’équipe du restaurant est bel et bien très occupé, soit à servir des clients, soit en cherchant du personnel. L’actionnaire ou le patron constate qu’il n’y a pas de temps mort. Tout le monde court dans tous les sens. L’équipe serait donc productive parce qu’elle est occupée. Faux. Ce mode de fonctionnement entraine en réalité une rentabilité nette médiocre.
Connaissant les niveaux de charges patronales et de salaires, quel restaurateur peut fonctionner avec un effectif supérieur à celui strictement nécessaire pour fonctionner ?
D’autant que la masse salariale devra comprendre la rémunération du gérant, souvent sous-évaluée dans les restaurants. De plus, les salaires devraient être supérieurs d’environ 10% aux salaires minimum observés dans la profession. Les bons professionnels obtiennent en général de meilleures rémunérations.
Cependant, il s’agit là d’arguments purement comptables, faisant abstraction de toute forme de prospective.
Lorsqu’on achète un restaurant, il vaut mieux privilégier une surface plus grande que prévue pour pouvoir accueillir à terme un succès imprévu au départ. En matière de volume de ressources humaines disponible dans l’entreprise, c’est la même chose. Les employés d’aujourd’hui accueillent les clients de demain.
Ce qui est sûr, c’est que les restaurateurs qui sont obligés de restreindre leurs effectifs, et ainsi leur masse salariale, le font parce qu’ils doivent privilégier d’autres personnalités morales à rémunérer :
- Le propriétaire des murs, de la marque (loyer),
- Le banquier (annuités de remboursement de crédit),
- Les fournisseurs (achats de marchandises).
Parce qu’une opération n’est structurellement pas viable (coût du capital trop élevé) ou parce qu’une exploitation de restaurant est négligente dans la gestion du produit (contrôle du coût matière), la prévision des effectifs devient dépendante d’une situation trop exigeante en terme de trésorerie.
Existe-t-il une norme pour prévoir les effectifs ?
Il n’y a pas de ratio « nombre de cuisiniers ou de serveurs par rapport à un nombre de places assises dans un restaurant » inscrit dans le marbre. La norme de productivité diffère sensiblement d’un restaurant à un autre. Ma recommandation est de toujours avoir un temps d’avance. La planification des effectifs pour le mois à venir, c’est déjà du passé. Planifiez vos équipes sur une période de six mois. Ainsi, on anticipe mieux la relation produit client à venir.
La restauration est un secteur idéalement placé pour innover en matière de développement des ressources humaines. Le restaurant de demain sera celui qui inclura dans les indicateurs de productivité des concepts comme la recherche de la mixité, une politique de rémunération identique entre les hommes et les femmes, une veille contre le harcèlement sexuel, moral, les violences verbales…En anticipant sur la conduite à tenir dans l’entreprise du 21ème siècle, la productivité devient un indicateur positif durablement.
Pour en savoir plus sur la marche à suivre pour optimiser la productivité de votre restaurant, contacter Laurent Pailhès en cliquant ici
Laurent Pailhès
Consultant gérant de NEO Engineering
Toutes les informations et données hébergées sur ce site sont protégées par un copyright. La reproduction et l’utilisation de la totalité ou d’extraits de données sont strictement interdites, sans l’autorisation préalable de NEO Engineering. (Loi n° 57-928 du 11/03/1957 sur la propriété littéraire, industrielle et artistique – Journal Officiel du 14/03/1957 et rectificatif Journal Officiel du 19/04/1957).
Propos recueillis pour le magazine BRA Tendances Restauration.